« Hé Brett, tu connais pas la dernière ? » « Raconte, fit-il en lançant sa balle de basketball directement dans le panier. » Anton, son meilleur ami de toujours, et lui se trouvaient sur le petit terrain de Sunnyside, celui qui bordait le parc eaglewood. La nuit était tombée depuis plusieurs heures déjà, mais la fraîcheur de ce crépuscule était agréable, surtout lorsqu'on était deux sportifs amoureux de la gagne comme eux. Dès qu'ils le pouvaient, lorsque Brett ne devait pas suivre un cours du soir, ou lorsqu'Anton ne devait pas faire des heures supplémentaires au restaurant, ces deux inséparables se réunissaient pour une soirée alliant sport, bières et nouvelles. « Il y a de l'eau dans le gaz entre Valentina et son jules. » Il jeta un coup d'oeil à son ami et ne pût s'empêcher de pouffer : « Tu pourrais au moins essayer de paraître triste pour elle. » « Ca se voit tant que ça ? » « T'as ton sourire niais collé sur le visage. » « J'ai pas de sourire niais ! » Anton rigola. Son ami était vraiment incorrigible. Il récupéra le ballon, fit quelque dribble et le lança à son tour, attendant patiemment que Brett craque et lui demande plus de précisions. « Et … tu sais si ils ont l'intention de se séparer ou quoi que ce soit ? » « Nan, ils vont rester ensemble, ils ont un enfant je te rappelle, c'est pas une petite broutille qui va les faire divorcer. » « Ma mère a quitté mon père du jour au lendemain. » « Ton père couchait avec sa secrétaire. » Brett marqua un arrêt lorsqu'il reçut la balle et faillit se perdre dans ses pensées.
Il avait une chance de récupérer Valentina. Sa Valentina. Celle que son coeur continuait de réclamer malgré les années de séparation, celle qu'il avait toujours considéré comme la femme de sa vie, celle qui possédait la clef de son âme, celle qui lui avait fait connaître ses plus grands moments de bonheur. Celle qui lui avait brisé le coeur. Ils étaient sortis ensemble au lycée, une vraie histoire de cinéma. Lui le prodige qui allait intégrer Yale, elle la beauté fatale Italienne. Ils étaient beaux, reflétaient un couple digne de ceux d'Hollywood. Ils avaient tout pour être heureux, leurs familles respective s'adoraient, pour un peu, on les aurait déjà vu marié. Mais il a fallût que la belle histoire finisse mal. C'est toujours comme ça, de toute façon. Il avait bien repéré le petit manège de ce type. Il n'arrêtait pas de lui tourner au tour, de l'inviter à diverses sorties auquel lui, Brett, n'avait pas voulu aller avec elle. Et puis, elle avait lâché la bombe peu de temps après le bal de promo. Ils étaient restés deux ans ensemble. Les deux plus belles année s de sa vie. Puis elle y avait mis fin. Sa voix tremblait, elle se tordait nerveusement les mains, elle balbutiait, mais le fait était là : elle le quittait, elle n'éprouvait plus rien pour lui excepté de l'amitié. Il n'avait pas prononcé un mot, trop furieux et blessé à la fois. Deux heures plus tard, il retrouvait cet abruti, lui cassait le nez et plusieurs dents.
« Non Brett, non. Je te connais, et je sais déjà que tu penses que tu peux reconquérir cette fille, mais elle n'est pas pour toi, d'accord ? » « Je suis sur que je peux me faire inviter à dîner dimanche prochain. »

« Eurgh, qu'est-ce que c'est que cette robe ? T'as l'air d'une énorme guimauve. » « Tu prononces encore un mot et je te fais avaler ton foutu ballon tout rond. » « Promis, je prends une photo et je ne dis plus un mot. » « Je vais te tuer Brett Hawkins-Volkov, et pire que ça encore, je vais poster des photo de toi quand t'étais petit, obèse et avec les dents de travers. » « Allons, qu'est-ce qui se passe ici ? Intervint Primera Volkov, la mère des deux trublions. » « Rien, je me demandais pourquoi Roxanne avait une telle horreur sur le dos. » « Alors là, tu l'as sacrément mal joué mon coco, c'est maman qui l'a cousue. » Sur ceux, elle attrapa un coussin qui se trouvait à portée de main avant de le lancer sur son frère. Pas besoin de faire un dessin de ce qui arriva ensuite. Leur mère, un sourire au lèvre et le vague à l'âme les regarda se chamailler, tels deux gamins. Malgré les années, Brett et Roxanne passaient toujours leurs temps à s'embêter, à se faire des blagues stupides. Comme si rien n'avait changé depuis l'époque du lycée. Pourtant, c'était loin d'être la vérité. Brett avait perdu Valentina, l'amour de sa vie. On avait diagnostiqué une cardiomyopathie à Roxanne. Suite à cela, la jeune femme s'était renfermée, quitte à entrer en dépression. Ce fût une période très dur pour toute la famille Hawkins-Volkov, notamment pour Brett qui avait toujours entretenu une relation fusionnelle avec sa soeur. Et voilà qu'elle refusait de lui parler. Mais le temps passant, elle s'était, petit à petit, réouverte au monde extérieur. Et même si parfois, le jeune homme l'exaspère en la surprotégeant, il sait qu'ils ont laissé le pire derrière eux.

« Je peux dormir avec toi Brett ? » « Ouais, j'ai besoin d'une oreille de toute façon. » Elle se glissa sous les draps, venant coller son petit corps contre le sien. Il prit une grande inspiration, ferma les yeux et se lança : « Je vais essayer de me remettre avec Valentina. Non attends, ne parle pas, l'interrompit-il, je sais ce que tu vas me dire, que c'est totalement stupide, que je suis le dernier des crétins, qu'une fille comme ça ne mérite pas qu'on lui court après, que c'est de l'histoire ancienne et tout ça, mais la vérité, c'est que depuis qu'elle est partie, ben j'ai toujours pas arrêté de penser à elle, à nous. Je me dis que je tiens là une chance de voir ma vie redevenir un peu plus rose, alors je ne vais pas la laisser passer. Je vais peut-être me fracasser par terre … ou peut-être pas, Dieu seul le sait. Alors voilà, je le dis haut et fort, je vais à coup sûr passer pour un psychopathe obsessionnel auprès d'elle, mais il faut qu'elle sache qu'elle me manque. Qu'elle me hante. »

« Gueule de bois ? Demanda Roxanne Hawkins-Volkov en pénétrant dans la quiétude sombre de la chambre de son frère. » Il avait enfoui son visage dans son oreiller et était allongé sur le ventre, de tout son long. Il n'avait même pas pris la peine de retirer ses vêtements lorsqu'il était rentré, seulement quelques heures auparavant. « Ca fait bien longtemps que je ne t'avais pas vu rentrer à six heures du matin, l'esprit complètement embrumé. » « Tu veux bien qu'on en parle quand les marteaux-piqueurs qui sont actuellement dans mon front auront pris congé ? » « Laisse moi deviner, elle est blonde, ses jambes font ma taille, elle habite trois rues plus loin et elle s'appelle … hum, au hasard : Valentina. » « Loupé, mais pas de beaucoup. » « Tu attises ma curiosité, fit-elle en frappant dans ses mains, laissant ainsi transparaître son enthousiasme. » Son frère avait réussit à se défaire de l'emprise de cette mégère ! C'était assurément une date à marquer dans le calendrier. « Je te le dis si tu me promets de ne pas hurler, de ne pas frapper dans tes mains … de ne pas être toi lorsque je te raconte quelque chose. » Elle acquiesça solennellement et vint s'asseoir en tailleur près de son frère qui se tournait sur le côté, ses doigts massant ses tempes douloureuses. « Ok, alors j'étais chez les Rossi hier soir, pour le dîner. J'avais prévu de prendre Valentina à part et de lui faire mon beau discours que j'ai mis des jours à écrire, alors je me suis mis à sa recherche pendant que son idiot s'occupait de leur enfant. J'étais dans le couloir du haut, celui qui mène à sa chambre, lorsque j'ai entendu comme des sanglots en provenance de la salle de bain, alors tu me connais, j'y suis allé … » Roxanne gloussa. Son frère adorait jouer les sauveurs de demoiselles en détresse.
Il lui raconta ensuite comment il avait découvert Victoria, la soeur cadette de Valentina, les joues ravagées par les larmes. Lorsqu'il était entré, il avait eût droit à son habituel regard noir empli de dédain. Mais il ne s'était pas laissé trompé, pas cette fois. Il avait vu la douleur et la détresse dans ces yeux habituellement si enclin à vous démonter. Brett s'était approché, pour la consoler, et ceux, même si leur relation était loin d'être amicale. Mais Victoria était un cheval sauvage, une bête indomptable (ou indomptée jusqu'alors). Elle l'avait purement et simplement envoyé balader. Ce qui l'avait bien fait sourire. Elle lui avait balancé qu'elle ne comprenait pas pourquoi tout le monde s'intéressait à Valentina, qu'elle n'était pas la Vierge Marie après tout, qu'il était ridicule à la poursuivre cinq ans après la fin de leur histoire, qu'il passait pour un gentil toutou.
Une chose est sûre, le contraste entre les deux sœurs Rossi est saisissant.
« Et alors, la suite, le pressa Roxanne. Qu'est-ce qui s'est passé après ? » « La suite est trop impure pour tes douces oreilles, fit Brett en haussant un sourcil évocateur. » « Beurg, ne dis rien, sautons ce passage. La suite ? » « La suite c'est qu'on a bien rigolé et qu'on s'est un peu perdu l'un dans l'autre. Elle avait besoin de réconfort, bien qu'elle préfèrerait sûrement se couper une main plutôt que de l'avouer et je me sentais seul et pathétique, désespérément amoureux de la même fille depuis des années. Je crois qu'on pourrait bien s'entendre si elle était moins … » « Froide, arrogante, prétentieuse, manipulatrice, caractérielle … ? » « Effrayée. C'est comme si elle avait peur de ressentir des émotions positives. » « Oh non. Je connais ce regard dans le vague. Elle te plaît. D'accord, je ne pensais pas dire ça un jour, mais à côté d'elle, même Valentina paraît être un choix enviable. »